Dans une décision récente du Tribunal des droits de la personne du Québec, une employée a été congédiée après avoir exprimé son malaise face à des blagues racistes entendues dans son milieu de travail. Ce jugement met en lumière les obligations des employeurs en matière de gestion des comportements discriminatoires et souligne l’importance de protéger les employés contre ces formes d’abus, qu’ils proviennent de collègues ou de clients.
Les Faits
L'incident a commencé lorsqu’un client a raconté une blague raciste à la directrice d'une boutique, en présence d'une employée noire. Bien que l’employée ait d'abord ignoré la remarque, la même blague a été répétée lors d’un souper d’équipe. Cette fois-ci, l'employée a exprimé son inconfort, ce qui a entraîné un malaise au sein du groupe.
Peu après, la directrice a présenté ses excuses à l’employée, mais a aussi insisté pour qu’elle maintienne une attitude positive au travail malgré l’incident. Suite à cela, l’employée a publié sur sa page Facebook privée un message exprimant son malaise, sans nommer directement son employeur ou donner de détails sur la situation. Le lendemain, l'employée a été congédiée, la directrice jugeant son attitude "inacceptable".
La Décision du Tribunal
Le Tribunal a conclu que le congédiement de l'employée était un acte de discrimination raciale. La preuve a montré que la décision de la congédier était directement liée à sa réaction face aux blagues racistes, une réaction légitime qui ne pouvait justifier une mesure disciplinaire aussi grave. Le Tribunal a rappelé que la Charte des droits et libertés de la personne interdit la discrimination fondée sur la race et la couleur (articles 10 et 16). Il est également interdit de sanctionner un employé pour sa réaction à un comportement discriminatoire.
Le Tribunal a accordé à l’employée une indemnité de 10 000 $ pour préjudice moral. De plus, il a ordonné à l’employeur d’adopter une politique anti-discrimination, ce qui était absent au moment des faits.
Leçons pour les Employeurs
Respecter les réactions des employés face à la discrimination : Il est crucial de ne pas punir les employés pour leurs réactions à des incidents discriminatoires. Une réaction émotionnelle est normale lorsqu'une personne est confrontée à un comportement raciste ou offensant.
Protéger les employés de toute forme de discrimination : Les employeurs doivent non seulement surveiller les comportements au sein de leur équipe, mais aussi protéger leurs employés contre les comportements discriminatoires de la clientèle ou d'autres tiers.
Établir des politiques anti-discrimination claires : L’absence de politiques visant à prévenir et gérer les incidents de discrimination a été un facteur aggravant dans ce jugement. Il est essentiel que toutes les entreprises disposent de telles politiques pour garantir un environnement de travail respectueux et inclusif.
Ce jugement rappelle aux employeurs l’importance de créer des environnements de travail exempts de discrimination et de répondre de manière appropriée aux comportements inacceptables. Réf. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Guillaume) c. Entrepôt de la lunette inc. (9318-1022 Québec inc.), 2022 QCTDP 13 (CanLII)
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