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Liberté syndicale et droits de gestion : une coexistence nécessaire

Dernière mise à jour : 5 avr.


Dans la décision arbitrale Union des employés et employées de service, section locale 800 c. Compagnie WestRock du Canada Corp. (2024 QCTA 286), l'arbitre Me Renée Baillargeon a tranché en faveur de l'employeur, rejetant le grief du syndicat qui contestait le refus de l'employeur d'autoriser une rencontre syndicale avec des membres durant les heures de travail. Ce cas met en lumière une question délicate et récurrente dans le domaine des relations de travail : l'équilibre entre la liberté d'action syndicale et les droits de gestion de l'employeur.


Les faits


Le syndicat réclamait le droit de rencontrer les salariés d'une équipe durant leurs heures de travail pour discuter de divers points liés à la convention collective. Selon la convention collective, l'employeur peut, dans certaines conditions, permettre de telles rencontres, mais celles-ci ne sont pas un droit automatique. Dans ce cas, l’employeur a refusé la rencontre, estimant qu'il n'existait aucune urgence ou problématique précise nécessitant une telle réunion durant les heures de travail. De plus, l'objectif principal de la rencontre semblait être de renforcer les liens avec les membres, ce qui, selon l'employeur, pouvait être fait lors d'une assemblée générale.


L'arbitre a jugé que ce refus était raisonnable et conforme aux dispositions de la convention collective. Celle-ci stipule que le syndicat peut, après accord de l'employeur, rencontrer les salariés durant les heures de travail, mais cet accord est discrétionnaire. L'employeur a le droit de demander les raisons justifiant la rencontre, ce qu’il a fait dans ce cas précis.


Le droit syndical : liberté, mais sans abus


Il est fondamental de souligner que la liberté syndicale est un droit protégé par la Charte des droits et libertés de la personne et le Code du travail. Toutefois, cette liberté n’est pas sans limites. Dans ce dossier, le syndicat a plaidé que l'employeur entravait son devoir de représentation et portait atteinte à sa crédibilité en refusant la rencontre. Cependant, l'arbitre a conclu que l'employeur n'avait pas agi de mauvaise foi, ni de manière abusive, arbitraire ou discriminatoire.


L'une des leçons principales de cette affaire est que, bien que la liberté syndicale doive être respectée, elle ne doit pas être utilisée de manière excessive ou déraisonnable. Le syndicat doit démontrer des motifs clairs et pertinents pour justifier une interruption des heures de travail, surtout lorsqu'il s'agit de rencontres ne relevant pas d'une problématique spécifique ou d'un grief en cours. L'employeur, de son côté, doit gérer ces demandes de manière objective, en tenant compte des besoins opérationnels de l'entreprise, sans toutefois entraver inutilement les activités syndicales.


Un message pour les deux parties


Cette décision rappelle aux employeurs l'importance d’agir de bonne foi et de respecter les obligations conventionnelles tout en exerçant leurs droits de gestion de manière raisonnable. Quant aux syndicats, ils doivent s'assurer que leurs demandes sont bien fondées et alignées avec les exigences prévues par la convention collective. Le recours abusif à la libération syndicale ou aux rencontres durant les heures de travail peut affaiblir leur cause, car ces droits doivent être exercés avec discernement.


En somme, l'arbitre a réaffirmé un principe fondamental des relations de travail : la liberté d'action syndicale est un droit important, mais qui doit coexister avec les impératifs de production et les droits de gestion de l'employeur. Ce jugement souligne la nécessité d’un dialogue clair et respectueux entre les deux parties afin d’éviter les conflits inutiles et de maintenir un climat de travail harmonieux.





 
 
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